Le génome complexe du mil rouge enfin décodé

Culture de l'éleusine (ou ragi) en Inde. © Dr Mathimaran Natarajan

Culture de l'éleusine (ou ragi) en Inde. © Dr Mathimaran Natarajan

L’éleusine – une forme de millet – présente deux caractéristiques importantes: la cérérale est riche en minéraux et s'avère résistante à la sécheresse et à la chaleur. Dans le cadre du programme de recherche Indo-Swiss Collaboration in Biotechnology (ISCB), coordonné par le Centre coopération et développement de l’EPFL (CODEV), des chercheurs de l'Université de Zürich ont décodé pour la première fois, et avec un niveau élevé de qualité, le vaste et très complexe génome de la céréale eleusine coracana, grâce à une combinaison innovante de technologies les plus modernes. Il s'agit d'une base fondamentale pour améliorer la sécurité alimentaire dans des pays tels que l'Inde et certaines régions d'Afrique.

Pour de nombreux paysans pauvres en Inde et en Afrique, l’éleusine, ou mil rouge (eleusine coracana), constitue un aliment de base important. La céréale est non seulement une source abondante de minéraux tels que le calcium, le fer, le magnésium et le zinc, mais elle contient aussi beaucoup de vitamines, et des acides aminés essentiels. Cette plante cultivée se distingue aussi par sa résistance à la sécheresse et à la chaleur. Du fait qu'elle est très saine et de surcroît sans gluten, elle est de plus en plus utilisée comme aliment dans les pays industrialisés aussi. Or, malgré son importance, la céréale a jusqu'ici fait l'objet de peu d'attention sur le plan scientifique.

Un génome étendu et complexe par la fusion de deux espèces de plantes

Le mil rouge s'est constitué par la fusion de deux espèces de plantes. Il s'agit donc d'une plante polyploïde, ce qui signifie qu'elle possède un quadruple ensemble de chromosomes, et dispose pratiquement de deux fois plus de gènes que ses variétés originales. La taille et la complexité de son génome lui confèrent sa capacité de résistance. En même temps, cela a rendu la recherche sur le génome considérablement plus difficile. Une équipe de recherche internationale, sous la direction de l'Université de Zürich, vient de réussir, pour la première fois, à décoder ce génome complexe. Il comprend environ 2,6 milliards de paires de bases et possède plus de 62'300 gènes – soit pratiquement le double du riz.

Une nouvelle stratégie pour séquencer et cartographier le génome

Quelque 57'900 gènes de l’éleusine – plus de 90% – se présentent en plus de deux copies. Du fait que les séquences ADN de ceux-ci sont très semblables, il a été difficile d'arranger les nombreux segments d'ADN décodés de manière correcte. L'équipe de Kentaro Shimizu, professeur à l'Institut universitaire de biologie de l'évolution et des sciences de l'environnement de l'Université de Zürich, en collaboration avec Ralph Schlapbach et Sirisha Aluri, du Functional Genomics Center de l'Université et de l'EPF de Zürich, a réussi à surmonter ces difficultés. Pour y parvenir, les scientifiques ont combiné une stratégie bio-informatique sophistiquée, et les méthodes de séquençage les plus modernes, de même qu'une nouvelle technologie, qui s'appuie sur le fait que dans le génome, de longues molécules individuelles d'ADN peuvent être cartographiées de manière optique. «La nouvelle stratégie que nous avons développée contribuera à déterminer le génome d'autres plantes cultivées polyploïdes, qui jusqu'ici ne se laissait pas décoder», dit Shimizu.

Améliorer l'apport en substances nutritives et la résistance à la sécheresse

Une équipe interdisciplinaire de chercheurs de Zürich et de Bangalore, en Inde, a travaillé sur ce projet. Ce travail a bénéficié du soutien de la Collaboration indo-suisse en biotechnologie (ISCB), un programme de recherche et développement bilatéral financé par les gouvernements suisse, indien et japonais, et coordonné par le Centre coopération et développement de l’EPFL (CODEV). L'objectif est d'améliorer la sécurité alimentaire en Inde et de soutenir la recherche. «Les données génomiques désormais disponibles de l’éleusine ouvrent de nombreuses possibilités pour une culture moderne de la plante. D'une part, on pourra pallier le manque de minéraux chez de nombreuses personnes en Inde, mais également dans les pays industrialisés; d'autre part, il sera possible d'accroître la résistance à la sécheresse et à la chaleur de cultures importantes», selon Shimizu.

Références

Masaomi Hatakeyama, Sirisha Aluri, Mathi Thumilan Balachadran, Sajeevan Radha Sivarajan, Andrea
Patrignani, Simon Grüter, Lucy Poveda, Rie Shimizu-Inatsugi, John Baeten, Kees-Jan Francoijs, Karaba N. Nataraja, Yellodu A. Nanja Reddy, Shamprasad Phadnis, Ramapura L. Ravikumar, Ralph Schlapbach, Sheshshayee M. Sreeman and Kentaro K. Shimizu. Multiple hybrid de novo genome assembly of finger millet, an orphan allotetraploid crop. DNA Research. 4 September 2017. DOI: 10.1093/dnares/dsx036

Contact:

Prof. Dr. Kentaro K. Shimizu
Institut für Evolutionsbiologie und Umweltwissenschaften
Universität Zürich
Tel: +41 44 635 67 40
E-Mail: [email protected]

Dr. Masaomi Hatakeyama
Institut für Evolutionsbiologie und Umweltwissenschaften
Functional Genomics Center Zurich
Universität Zürich
Tel: +41 44 635 49 50
E-Mail: [email protected]

Media Relations
Universität Zürich
Tel. +41 44 634 44 67
E-Mail: [email protected]


Auteur: Communication Université de Zurich

Source: EPFL