Modifier un environnement virtuel en quelques gestes

Le logiciel de la spin-off Imverse permet de modifier des images de réalité virtuelle en temps réel © 2018 Imverse

Le logiciel de la spin-off Imverse permet de modifier des images de réalité virtuelle en temps réel © 2018 Imverse

Créer et modifier un environnement de réalité virtuelle devient un jeu d’enfant ou presque. Imverse, une spin-off de l’EPFL, sort aujourd’hui un software s’apparentant à un logiciel de retouche photo. Son secret est un moteur de rendu 3D par « voxel » -des pixels en 3D-, qui peut être utilisé pour d’autres applications, comme la représentation de personnes réelles. La jeune société vise dans un premier temps l’industrie du film et des jeux vidéo.


Un casque de réalité virtuelle sur la tête, l’utilisateur du logiciel d’Imverse, une spin-off de l’EPFL, pointe à l’aide de contrôleurs manuels des outils pour découper, coller, peindre, agrandir, etc. L’environnement virtuel se modifie rapidement, même à partir d'une photo 2D ou 360, au gré de la créativité de l’utilisateur. Ce dernier se retrouve rapidement au centre d’un nouveau décor en repoussant les murs, en créant des espaces, en ajoutant du mobilier, en variant les couleurs, etc. L’utilisation de ce software, dont la version bêta est disponible en ligne dès aujourd’hui, ressemble fortement à celle d’une interface pour retoucher les photos.

Dix fois moins de temps pour préparer un scénario en 3D

Ce programme représente un gain de temps et offre de nouvelles possibilités pour de nombreuses professions comme les agents immobiliers, les décorateurs, les graphistes les photographes, la vente au détail et même les ingénieurs pour certaines modélisations. Mais la start-up mise dans un premier temps sur l’industrie du film, des médias et des jeux vidéo, pour imager en 3D les scénarios, pré-visualiser les décors et leur évolution, prévoir l’emplacement des caméras et des acteurs ... « Un producteur peut ainsi prendre des photos 360 degrés dans des endroits réels, les transformer en environnement 3D, les modifier et visualiser en réalité virtuelle ce qu’ils vont faire en vrai. Le temps nécessaire pour cela est divisé par dix en comparaison avec l’utilisation des méthodes traditionnelles », assure Javier Bello, cofondateur et CEO.

Viser d’emblée le marché du film pourrait paraître ambitieux. Pourtant la petite entreprise ne se lance pas à l’aveugle puisqu’elle a déjà eu l’occasion de tâter le terrain et nouer des contacts notamment lors du plus important festival du film indépendant des États-Unis, le Sundance Festival, au début de l’année, puis au Festival de Cannes. « Notre premier marché est le divertissement, car les professionnels connaissent déjà les logiciels pour créer des effets visuels ou la capture de mouvements. Ils comprennent bien comment notre programme peut simplifier leurs processus et leur faire gagner du temps », souligne Javier Bello. De plus, cibler l’industrie du film et du jeu permet d’entrer en contact avec de grosses compagnies comme Intel, Microsoft ou Oculus.

Une technologie à fort potentiel basée sur le voxel

Si Imverse voit grand, c’est aussi parce que la technologie graphique sur laquelle son logiciel est basé peut être utilisée pour de nombreuses autres applications. Ce puissant moteur de rendu par voxel – pixel en 3D- permet d’éviter les fameux filets constitués de polygones, bien connus de la création de jeux vidéo ou de films d’animation. Il n’est pas nouveau, mais était jusqu’à récemment bien trop gourmand en puissance de calcul pour espérer obtenir un rendu en temps réel.

« Notre technologie, développée durant douze ans au sein du Laboratoire de neuroscience cognitive pour des expériences dans le domaine de la neurologie, nous permet de créer des outils, des processus et des manières plus intelligents afin de connecter le hardware au software», souligne le chercheur-entrepreneur, expert de la réalité virtuelle. Avec son collègue et cofondateur, Robin Mange, ils voient un avenir prometteur pour cette technologie en raison de la diversité des applications possibles. « Pas seulement avec la réalité virtuelle d’ailleurs, mais on commence avec cela pour prouver qu’elle peut être intéressante jusqu’à ce niveau de précision », poursuit-il.

Serrer la main d’un ami à la fois dans le monde réel et virtuel

Le prochain outil développé par la start-up est un système permettant d’intégrer dans la réalité virtuelle une représentation en temps réel de son propre corps ainsi que des personnes à proximité. La technologie a d’ores et déjà été utilisée par un artiste pour un court-métrage, Elastic Time. Présenté durant le Sundance Festival, il a permis à des professionnels de tester le système. «Cela ouvre la porte à de nouveaux scénarios puisqu’il est désormais possible d’interagir en direct à la fois dans la réalité virtuelle et en vrai », note Javier Bello.