Un parcours à trous pour assembler précisément les nanoparticules

Les nanoparticules contenues dans la goutte se détachent et tombent dans les "puits" nanométriques©Valentin Flauraud / 2016 EPFL

Les nanoparticules contenues dans la goutte se détachent et tombent dans les "puits" nanométriques©Valentin Flauraud / 2016 EPFL

Des chercheurs de l’EPFL ont développé une méthode pour placer et orienter très précisément des centaines de milliers de nanoparticules sur une surface d’un centimètre carré. De quoi ouvrir de nouvelles portes dans les nanotechnologies.

Façonner des composants et les assembler avec précision : des étapes qui se retrouvent dans tout procédé industriel, et qui permettent la construction d’objets allant des stylos à bille aux navettes spatiales. Dans le monde de l’infiniment petit, en revanche, le fait de manipuler et d’assembler des nanoparticules performantes sur un substrat reste très délicat.

A l’EPFL, des chercheurs du Laboratoire de Microsystèmes dirigé par Jürgen Brugger, ont élaboré une méthode qui permet de positionner précisément des centaines de milliers de nanoparticules sur une surface d’un centimètre carré. Les nanoparticules ont été placées jusqu’à un nanomètre de distance– contre 10 à 20 nanomètres avec les méthodes conventionnelles— et orientées au degré près.

Publié dans Nature Nanotechnology, ce travail ouvre la voie à la fabrication de nouveaux dispositifs nanométriques, utiles aussi bien en matière de détection optique, que pour la fabrication de capteurs biologiques. «Si l’on parvient à placer des nanoparticules d’or à un nanomètre l’une de l’autre, on peut par exemple confiner la lumière de manière extraordinaire, et détecter ou interagir avec des molécules individuelles», illustre Valentin Flauraud, premier auteur.

«Jouer au golf» avec des nanoparticules
Pour leur étude, les chercheurs ont utilisé des nanoparticules d’or que l’on a fait croître chimiquement dans un liquide. «Ces nanoparticules ont de meilleures propriétés que celles qui sont fabriquées par évaporation ou gravure, mais il est plus difficile de les manipuler, car elles sont en suspension dans un liquide», commente Valentin Flauraud.

La technique consiste à prendre une goutte de liquide remplie de nanoparticules, puis de la chauffer, afin de concentrer les nanoparticules à un endroit donné. On déplace ensuite cette goutte sur un substrat doté de barrières et de trous nanométriques.

En passant sur ces obstacles, les nanoparticules se détachent du liquide et sont retenues dans les cavités. «C’est un peu comme si nous jouions à du golf miniature», illustre le chercheur. Les nanoparticules sont ainsi retenues dans le trou, conçu pour donner une orientation spécifique à son hôte. «La difficulté a été de comprendre l’interaction entre le liquide, les particules et le substrat à l’échelle nanométrique pour pouvoir piéger efficacement les nanoparticules» ajoute Massimo Mastrangeli, second auteur et maintenant chercheur au Max Planck Institute for Intelligent Systems in Stuttgart


Un alphabet à l’échelle nano

(Source : Nature Nanotechnology)

Pour démontrer l’efficacité de leur méthode, les chercheurs ont relevé plusieurs défis. Ils ont notamment testé les propriétés optiques de leur système à l’aide un puissant microscope électronique à transmission du Centre interdisciplinaire de microscopie électronique de l’EPFL (CIME).

Ensuite, ils ont montré que leur technique permettait de fabriquer des structures géométriquement complexes, en écrivant l’alphabet avec des nanoparticules, soit le plus petit affichage à segments au monde. « Ce travail, exécuté dans sa totalité à l’EPFL est le fruit d’une belle synergie entre les différentes plateformes techniques et les laboratoires. C’est un excellent exemple de combinaison de méthodes « top down » et « bottom up» qui ouvre la porte à de nombreux domaines encore inexplorés en nanotechnologie » conclut le professeur Jürgen Brugger.

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Publication dans Nature Nanotechnology: Nanoscale topographical control of capillary assembly of nanoparticles

Travail réalisé en collaboration avec Massimo Mastrangeli, second auteur et actuellement chercheur au Max Planck Institute for Intelligent Systems à Stuttgart

Partenaires :

Laboratoire de Nanophotonique et Metrologie (NAM)
Centre de MicroNanotechnologie (CMi)
Centre interdisciplinaire de microscopie électronique (CIME)

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Auteur: Laure-Anne Pessina

Source: EPFL